Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 6, doc. 90
volume linkBern 1981
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2300#1000/716#1241* | |
Old classification | CH-BAR E 2300(-)1000/716 520 | |
Dossier title | Wien, Politische Berichte und Briefe, Militär- und Konsularberichte, Band 30 (1910–1915) | |
File reference archive | 188 |
dodis.ch/43365
Le 30 novembre dernier2 je vous écrivais qu’à la suite de l’entrevue que le comte Tisza avait eue avec l’Empereur d’Allemagne on pronostiquait la retraite prochaine du comte Berchtold, Ministre des Affaires Etrangères, et son remplacement par le Président du Conseil hongrois, et j’opinais qu’il n’y avait là rien d’improbable. Le comte Berchtold vient de donner sa démission et il est remplacé par le baron Burian, Ministre hongrois a latere.
Le comte Berchtold, nommé aux Affaires Etrangères à la mort du comte Aerenthal le 20 février 1912, n’était certainement pas entré très volontiers au Ballhausplatz et ce n’est un secret pour personne qu’il a déjà exprimé deux ou trois fois le désir d’en sortir. Ancien ambassadeur à Pétersbourg, grand seigneur, sportsman convaincu, énormément riche, ayant à s’occuper de multiples domaines, peu familiarisé avec la vie politique et parlementaire de la Monarchie, d’ailleurs assez indolent, il se vit d’emblée en présence de complications internationales comme jamais peut-être la Monarchie n’en avait traversé. Son rôle dans la crise balkanique se caractérise par les sympathies bulgares, par l’opposition aux tendances expansives de la Serbie et par la création de l’Albanie, enfant terrible dont la naissance pénible et l’existence précaire n’ont guère donné de satisfactions à ses auteurs. Homme foncièrement pacifique, il a été-j’en suis convaincu - entraîné malgré lui dans la monstrueuse tourmente actuelle. Et pourtant les ambassadeurs de la Triple Entente sont unanimes à lui reprocher qu’il n’a jamais voulu entamer avec eux des entretiens à fond qui eussent pu empêcher le conflit: entre eux et lui, il y avait toujours comme un mur infranchissable derrière lequel il se dérobait.
Il déclare aujourd’hui (à un collègue de qui je le tiens): «Je suis diplomate et aurais dû le rester, et ne pas accepter le Ministère des Affaires Etrangères car je ne suis pas homme politique.»
En réalité, il connaissait peu la vie parlementaire de la Monarchie et les séances des Délégations où il devait répondre aux interpellations sur la politique étrangère n’ont pas toujours tourné à son avantage. Actuellement, dans la crise décisive qui la secoue, la Monarchie a besoin d’hommes à poigne. Et c’est pourquoi le comte Tisza est l’homme du jour. La Hongrie ne peut se passer de lui. Aussi reste-t-il à Budapest. Mais le baron Burian est son alter ego. Et Tisza prenant d’ailleurs la direction provisoire du Ministère hongrois a latere devra venir fréquemment à Vienne. Le baron Stefan Burian de Rajecz, né en 1851, passe pour un profond connaisseur des pays balkaniques. Il a suivi d’abord la carrière consulaire et diplomatique, a occupé divers postes tels que Alexandrie, Bucarest, Belgrade, Sofia, Moscou, Stuttgart, Athènes. Nommé en 1903 Ministre commun des Finances, il quitta ces fonctions lors de la nomination du comte Berchtold, deux hongrois ne pouvant ensemble faire partie du Ministère commun. En 1913, Tisza l’appela au Ministère hongrois près la Cour IetR. Sa nomination est accueillie avec sympathie. La démission du comte Berchtold, tenue très secrète, a causé pourtant une grande surprise, Je vous signale l’idée émise par le Berliner Tagblatt (14 janvier) qu’elle se relierait à l’incident diplomatique de la gare du Sud: le comte Berchtold aurait désiré donner des satisfactions que le Ministère de la Guerre se serait refusé d’accorder. Je ne le crois pas, mais dois avouer que la chose n’a rien d’invraisemblable pour qui connaît la susceptibilité exagérée des autorités militaires de la Monarchie.
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