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Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 15, doc. 438
volume linkBern 1992
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001E#1000/1572#565* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(E)1000/1572 57 | |
Dossier title | Finanzabkommen mit Frankreich vom 30. Mai 1941 (1942–1945) | |
File reference archive | C.44.205.0 • Additional component: Frankreich |
dodis.ch/48042 Notice sur les relations financières franco-suisses1 SÉANCE CHEZ M. HOTZ, AU SUJET DES DISPOSITIONS D’APPLICATION EN SUISSE DE L’ACCORD FINANCIER AVEC LA FRANCE. DISCUSSION DU PROJET D’ARRÊTÉ DU CONSEIL FÉDÉRAL RÉGLANT LE TRAFIC DE PAIEMENTS AVEC LA FRANCE
Présents: MM. Hotz, de Torrenté, Bonhôte, Decroux, Probst, de la Division du Commerce, Kohli, Kappeler, du Département Politique, Jacot, de l’Administration des Finances, Hornberger, Frey, du Vorort, Hirs, Rossy, de la Banque nationale, Böhi, de l’Office suisse de Compensation, et le soussigné2.
M. Hornberger rappelle la nécessité d’instituer un contrôle sérieux en Suisse, en vue du bon fonctionnement de notre accord de change avec la France. Il faut décider quelle forme il prendra, si l’on va centraliser les paiements comme c’était le cas pour le clearing. Cela paraît nécessaire, si l’on veut que ce contrôle soit efficace et que le produit de la vente des importations françaises serve à financer les exportations. Ce contrôle serait fait dans l’intérêt même des Français.
M. Hotz: A en croire les conclusions de la conférence de Bretton Woods, les accords de clearing devraient disparaître. On n’a malheureusement rien trouvé de mieux jusqu’à présent, et les accords inspirés par ces nouvelles idées sont une vaste fumisterie.
On nous a déclaré qu’il fallait faire tout de suite et à tout prix un accord financier, qui a été paraphé le 6 mars. L’expérience prouve maintenant que tout cela est une question de mots: il n’y a pas d’accord de change libre; c’est un clearing, mais un clearing qui ne nous donne pas les mêmes garanties que l’ancien système. La Division du Commerce, qui n’est pas un Office de capitulation, est décidée maintenant à adopter une attitude plus réaliste et à renoncer à la politique des gestes gratuits, qui se révèle onéreuse. Le fonctionnement de notre accord prouve simplement que l’administration française n’est pas à la hauteur de sa tâche et aussi longtemps que cette affaire ne sera pas réglée de façon plus satisfaisante, il se refuse à aller négocier à Paris. La proposition concernant Marseille est un nouvel exemple de ce à quoi nous pouvons nous attendre. A quoi bon d’ailleurs signer des papiers, qui se révèlent ensuite n’avoir aucune valeur.
M. Hirs croit devoir remarquer que cet accord correspondait à un geste politique, qui malheureusement a le danger de créer un précédent. Si nous pouvions acheter en France, cet accord serait idéal, mais ce n’est malheureusement pas le cas. M. Hirs, qui a examiné le projet d’A.C.F. établi par la Division du Commerce, trouve qu’il complique passablement les choses et se demande si on ne pourrait pas faire pour la France un règlement semblable à celui que nous avons institué pour les paiements avec les pays du groupe dollar. Le contrôle serait le même, à cela près que pour les francs français il s’agirait de sommes moins importantes. La Banque nationale en général préfère la plus grande simplicité possible à l’introduction de nouvelles mesures de contrôle. En outre, déclare M. Hirs, il serait très important que la Banque nationale pût discuter de vive voix de toutes ces questions avec les représentants de la Banque de France.
M. Hornberger: Le point de vue exprimé par M. Hirs lui paraît très logique, mais il n’est pas fondé sur la réalité. En effet, l’application de cet arrêté n’impliquerait nullement l’introduction d’un nouveau système de contrôle. Tous les éléments en existent déjà actuellement. Alors que pour introduire un système analogue à celui que nous avons à l’égard des pays du groupe dollar, il faudrait édifier de toutes pièces tout un contrôle.
M. Hornberger démontre facilement qu’il s’agit là non d’une complication, mais d’une simplification.
M. Hirs, convaincu par ces arguments, est très heureux d’avoir cette assurance et se range au point de vue de M. Hornberger. Tout ce que désire la Banque nationale, c’est de pouvoir exercer un contrôle efficace de la façon la plus simple possible.
M. Hirs manifeste l’espoir que toutes ces réglementations et contrôles, qui sont nés du blocus et du contre-blocus, finiront par disparaître, y compris le système que nous appliquons à l’égard des pays du groupe dollar. Il faut envisager le plus rapidement possible le retour à un régime plus libre et ne pas introduire maintenant des réglementations trop lourdes.
M. Rossy: Il n’y a pas de doute, selon lui, que les Français, lorsqu’ils ont conclu leur accord, entendaient introduire un régime plus libéral. Il s’avère cependant que la Banque de France joue un rôle si effacé qu’elle ne peut fournir à la Banque nationale tous les renseignements qu’elle serait en droit d’attendre. M. Bloch-Lainé s’est déclaré d’accord qu’il y eût une certaine réglementation en Suisse. Cela ne le regardait pas, disait-il. Il ne faut pas s’attendre toutefois à pouvoir simplifier à l’extrême nos relations financières avec la France, comme on pourrait le faire pour un pays plus éloigné, en raison de nos frontières communes, qui créent de nombreuses possibilités d’infiltration (billets, etc.). En outre, nos relations commerciales comprennent de multiples opérations de moindre importance, qui vont se développer et qu’on ne peut d’ailleurs qu’encourager (Kleinverkehr). Il s’agit donc que tout le monde soit fixé par une réglementation claire et impérative, que les gens sachent où ils doivent faire leurs paiements, qu’il n’y ait pas de doute possible.
Cette réglementation, comme le dit M. Hornberger, serait dans l’intérêt même de la France, mais il est peu probable qu’elle en convienne.
En ce qui concerne le projet d’A.C.F., il est dangereux, selon lui, de le simplifier par trop. Outre l’obligation morale où nous nous trouvons de veiller à l’application intégrale de l’accord, il est de notre intérêt que les Français n’utilisent pas trop vite leurs deux tranches de 125 millions, car ils auront tôt fait de nous demander un supplément, que nous aurons peut-être de la peine à leur refuser. Il faut gagner du temps en outre pour utiliser dans la mesure du possible les francs français qui sont mis à notre disposition.
M. Hotz souligne la nécessité de prendre, du côté suisse, toutes les précautions nécessaires. Ne comptons pas sur les Français pour nous aider. La période des gestes est terminée et il faut se défendre efficacement. Il en était tout différemment lors du fonctionnement du clearing, où la France avait intérêt à ce que les maisons suisses effectuent leurs règlements au clearing, pour diminuer un déficit sans cesse grandissant. Maintenant que cet intérêt n’existe plus, ne comptons que sur nous-mêmes.
M. Kohli: Il est évident que dans la situation où elle se trouve, la France essaie de se procurer chez nous la plus grande quantité de marchandise possible. Elle a un contrôle des changes et nous n’en avons pas; nous ne pouvons donc nous défendre que si nous instituons de notre côté un contrôle efficace. Nous avons fait dans ce domaine nos expériences avec l’Allemagne, aussi en ce qui concerne les crédits. Il faut en tenir compte et freiner autant que possible les prélèvements en francs suisses, afin que la France ne se trouve pas très prochainement dans la situation de nous redemander une nouvelle tranche. Enfin, puisque cet accord avec la France constitue un «Revolving Credit», il faut tâcher qu’il nous serve à obtenir le plus possible de marchandise en France.
M. Hornberger a d’autres arguments contre l’introduction d’un nouveau système de contrôle: l’ancien clearing doit encore être liquidé et cette liquidation doit être faite par l’Office suisse de Compensation. La nécessité est donc évidente de maintenir le même organe de contrôle et de surveillance pour mener à bien cette liquidation. Ceci n’est possible que si ce même organe s’occupe également des opérations courantes, sans quoi, vu la tentation résultant de la différence de cours auquel sont transférées les créances anciennes et les créances nouvelles, des abus ne manqueront pas de se produire.
M. de Torrenté tient à relever l’impression psychologique que créerait la publication de cet A.C.F. en France et même en Suisse, où, en raison de la propagande française, beaucoup de gens s’imaginent que le principe des paiements a changé du tout au tout et qu’on en est revenu à un système libéral. Ils risquent d’être désillusionnés. Notre geste se trouvera de ce fait plus ou moins annulé; il nous coûte pourtant 250 millions.
M. Kohli: Il faut choisir ce que nous préférons: ou les effets de l’absence du contrôle, qui ne manqueront pas d’être déplorables, ou l’impression causée en France par une nouvelle mesure de contrôle, qui sera évidemment plutôt fâcheuse.
M. Rossy attire l’attention sur le nom de l’Office suisse de Compensation, qu’on retrouve dans le projet d’arrêté. Il est à craindre qu’il ne rappelle de mauvais souvenirs aux Français, qui le lient au clearing. Ne pourrait-on pas le remplacer simplement par le Département de l’Economie publique, qui se réserverait de déléguer ses pouvoirs à une instance qu’il ne serait pas nécessaire de nommer?
M. Hornberger ne voit pas bien comment les Français pourraient prendre ombrage de mesures de contrôle suisses qui constituent, à proprement parler, une collaboration. Si les Français y font obstacle, c’est qu’ils s’associent ouvertement aux fraudeurs.
M. Jacot rappelle le précédent créé par la convention belgo-hollandaise de 1943. De tels accords ne se comprennent que si chaque partie a ou introduit le contrôle des changes, ou prend les mesures qui s’imposent pour le bon fonctionnement de l’accord. Il ne voit donc pas pourquoi on craindrait de telles mesures en Suisse.
M. de Torrenté constate qu’il a été mal compris. Il est entièrement d’accord sur le fond, et ses arguments ne visent que la forme. N’y aurait-il pas un moyen de se référer à des mesures déjà existantes, puisqu’on constate que ces contrôles sont déjà en vigueur? Cette nouvelle codification lui paraît un peu lourde et de nature à nous attirer des ennuis hors de proportion avec les avantages qu’elle nous apporterait.
Suivent diverses propositions tendant à modifier ou atténuer le texte du projet d’arrêté, afin d’obvier aux inconvénients relevés par M. de Torrenté. M. Hotz propose finalement de revoir le texte même article par article. Il fait remarquer que ce projet ne fait pas allusion à l’accord financier franco-suisse, puisque ce dernier n’a pas été publié.
M. Rossy relève de son côté que si la Banque nationale est entièrement d’accord de contrôler les paiements qu’elle reçoit, elle n’est matériellement pas en mesure de courir après les gens pour les faire payer. Cette contrainte est du ressort de l’Office suisse de Compensation.
[...]3
- 1
- E 2001 (E) 2/610. Paraphe: BH.↩
- 3
- La fin de la séance est consacrée à un examen, article par article, du projet (non reproduit). Cf. aussi E 7110/1967/32/821, AVA Frankreich/3.↩
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