Classement thématique série 1848–1945:
II. LES RELATIONS INTERGOUVERNEMENTALES ET LA VIE DES ETATS
II.1 LA SITUATION GÉNÉRALE
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 7-II, doc. 58
volume linkBern 1984
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001B#1000/1522#1* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(B)1000/1522 1 | |
Dossier title | Aussenpolitische und militärische Berichte von Bern an schweizerische Vertretungen im Ausland (Auszüge aus politischen Berichten) (1918–1920) | |
File reference archive | D.1 |
dodis.ch/44269
La Division des Affaires étrangères du Département politique aux Légations de Suisse1
M. Ritter, Ministre de Suisse à La Haye, a donné sa démission, que le Conseil fédéral a acceptée avec remerciements pour les services rendus.
La question de la création de nouvelles Légations2 et de la réforme du service diplomatique et consulaire n’a pas encore été traitée à fond par le Conseil fédéral. La plupart de ses membres sont absents et c’est seulement lorsque le Conseil sera au complet que ces importantes affaires seront traitées. Il serait donc prématuré de faire des conjectures ou des commentaires au sujet de l’attitude du Conseil fédéral ou des départements intéressés. Le point de vue du Département politique est qu’il est important et urgent de créer des Légations dans les pays scandinaves, en Pologne, en Serbie, qu’il serait utile d’en créer aussi à Prag ue et à Athènes et que des Consulats généraux sont indiqués à Constantinople, à Shanghaï et au Caire. Les intérêts de nos nationaux, les questions politiques, le trafic ne sauraient être laissés plus longtemps dans l’abandon où ils se trouvent.
En attendant, le Conseil fédéral a décidé, comme vous le savez, d’envoyer à VarsovieM. Junod, ancien Ministre-résident à Pétrograde.3 Sa tâche consistera à entrer en relations avec le Gouvernement polonais au sujet des matières qui intéressent la Suisse: c’est une prise de contact et il ne s’agit là que d’une mission temporaire.
La question de savoir si M. Junod recevra une mission analogue à Prag ue ou si une autre combinaison sera adoptée n’est pas encore tranchée d’une manière définitive.
Les journaux ont reproduit une nouvelle tendancieuse du «New York Herald», d’après laquelle le siège de la Ligue des Nations devrait être transféré de Genève à Bruxelles.4 Tous les renseignements que nous avons recueillis concordent à décrire ce canard comme une des nombreuses tentatives belges en faveur de Bruxelles. Il n’y a rien d’exact dans ce racontar. La majorité des Puissances continue à se prononcer en faveur de Genève. Elles estiment qu’il est essentiel pour le bon fonctionnement de la Ligue qu’elle soit administrée dans un pays resté neutre lors de la dernière guerre, l’influence d’un pareil milieu étant indispensable au développement de la Société.
Dans le «Corriere délia Sera», M. Luzzatti a écrit un long article hier pour protester contre le choix de Genève, en déclarant que c’est une des fautes de l’ancien Gouvernement de n’avoir pas voté pour Bruxelles, qui seule mérite de posséder le siège de la Ligue. Ce n’est pas la première fois que M. Luzzatti se retourne contre nous.
Vous aurez lu dans les journaux le communiqué du Conseil fédéral au sujet de la publication des documents secrets, relatifs à la Ligue des Nations.5 Ce communiqué a été fortement défiguré dans sa rédaction française que l’agence télégraphique a mal transmise. Le Conseil fédéral s’oppose à la publication des rapports secrets de nos autorités militaires, qui contiennent des observations qu’il n’est pas désirable de livrer au public. Grâce à l’attitude nette du Conseil fédéral, aucune indiscrétion n’a été commise jusqu’ici et la presse n’a pas publié ces rapports, dont les membres des commissions parlementaires ont seuls eu connaissance.
Les délégués du Vorarlberg6n’ont pas encore reçu leurs passeports. Nous les avions recommandés à l’Ambassade de France par une petite note verbale; nous avons ensuite fait demander oralement à l’Ambassade si les passeports n’étaient pas encore accordés et nous avons, il y a trois jours, chargé notre Légation de faire la même demande à Paris.
A teneur de renseignements confidentiels, le traité avec l’Autriche paraît prévoir une procédure et une instance qui statuerait sur la demande du Vorarlberg d’être rattaché à la Suisse. Nous avons chargé notre Légation à Paris de rappeler à M. Dutasta que, par notre constitution, une réunion du Vorarlberg à la Suisse ne pourrait se faire que sur la base d’un vote du peuple et des cantons, de sorte qu’une décision du Traité de Paix ne saurait préjuger la décision de la Suisse. Nous avons ajouté qu’aucune autorité fédérale n’avait encore pu prendre une position officielle, de sorte que la question restait ouverte. Enfin, nous avons chargé notre Légation de faire savoir à Paris qu’à notre avis il serait juste que le Traité de Paix reconnût expressément le droit de libre disposition du Vorarlberg.
Depuis lors, nous n’avons plus reçu de nouvelles de Paris: d’après les journaux, le Traité serait remis demain à M. Renner.
Entre temps, les délégués du Vorarlberg se démènent à Berne. Ne recevant pas leurs passeports, ils ont adressé à M. Clemenceau, le 27 août, un nouveau télégramme, dans lequel ils demandent l’insertion, dans le texte du Traité de Paix, du passage suivant: «Les parties contractantes reconnaissent l’indépendance du Vorarlberg dans le sens des résolutions prises par son Landtag, et lui concèdent le droit de faire usage à son gré du principe de libre disposition. Sous réserve de cette reconnaissance, une convention ultérieure réglera les rapports du Vorarlberg vis-à-vis de la république autrichienne.» La Légation d’Amérique, qui montre beaucoup de bienveillance à nos amis vorarlbergeois, a communiqué ce texte à M. Wilson, et à Paris, ainsi que les autres documents émanant de MM. Neubner et Pirker.
Ces deux malheureux sont dans une situation assez difficile. Ils dépensent ce qui, pour qui connaît les mœurs des paysans du Vorarlberg, représente un argent fou, et n’ont jusqu’ici rien à rapporter à leurs commettants. On paraît trouver au Vorarlberg qu’ils s’aplatissent un peu trop devant M. Clemenceau, mais ils ont l’impression que le succès de leur entreprise vaut bien quelques courbettes. Enfin le parti pangermaniste expoite à fond la situation et mène une campagne féroce contre les deux délégués qu’il voudrait voir pendre pour haute trahison à leur retour à Bregenz! La campagne des pangermanistes n’est pas destinée à l’usage interne, car elle fait rire les Vorarlberg eois; elle est destinée à la consommation suisse. Les pangermanistes essayent en effet par tous les moyens de persuader l’opposition suisse qu’en incorporant le Vorarlberg nous introduirions dans notre sein des irrédentistes allemands. Cette méthode a un certain succès, bien qu’elle soit cousue de fil blanc, car les pangermanistes de Bregenz ne sont pas des Vorarlberg eois, mais des Allemands qui secoueraient la poussière de leurs pieds sur le Ländle, dès qu’ils n’auraient plus l’espoir de l’annexer. Cette propagande, si elle est connue dans l’Entente, ne pourra qu’encourager les Puissances à favoriser le rattachement du Vorarlberg à la Suisse, dans la crainte de le voir tomber entre les mains du Schwaben Kapitel. [...] .
La situation de la Suisse, en ce qui concerne la législation sur la navigation aérienne est la suivante: nous vivons en régime provisoire, sur la base des pleins pouvoirs du Conseil fédéral. Un article constitutionnel est en préparation, pour donner à la Confédération les compétences nécessaires à l’élaboration d’une loi sur la navigation aérienne qui ne pourra toutefois entrer en vigueur qu’à la fin de 1920 au plus tôt. Le Département militaire a ordonné en conséquence à titre provisoire que des avions étrangers ne pourraient voler dans l’espace aérien suisse qu’avec une autorisation spéciale; il a réglé la législation aérienne par une ordonnance temporaire et a ensuite désigné une Commission pour la préparation d’un projet de droit aérien suisse. Cette Commission a élaboré des propositions qui seront probablement adoptées et mises en vigueur à titre provisoire.
Entre temps, la Grande-Bretagne et la France ont conclu un accord temporaire sur la navigation aérienne entre les deux Etats. Cet accord restera en vigueur jusqu’à la conclusion du Pacte International aérien, dont le projet a été préparé à Paris. Nous ne connaissons pas officiellement le texte du projet de Pacte International, mais nous avons réussi à nous le procurer à titre strictement confidentiel. Il concorde, dans ses grandes lignes, avec l’accord franco-anglais. La souveraineté des Etats sur leur espace aérien y est officiellement reconnue, mais la liberté de la navigation aérienne civile et inoffensive est expressément stipulée, dans les limites des lois nationales.
La Légation d’Angleterre à Berne nous a suggéré de conclure avec son Gouvernement un arrangement provisoire sur la base de l’accord anglo-français, et la France nous a fait des propositions analogues. Nous avons soumis l’affaire au Département militaire et il est probable que le désir de nos voisins sera pris en considération. Nos efforts tendront à réserver aux Suisses la navigation aérienne à l’intérieur du pays, afin d’éviter que notre jeune aviation ne soit immédiatement étouffée par la concurrence étrangère. D’autre part, il faut ouvrir la porte à la navigation internationale à l’entrée et à la sortie de la Suisse, et il faut régler la question du survol de la Suisse sans atterrissage. Nous avons un intérêt à ce que les grandes lignes de navigation aérienne que l’on est en train de créer n’évitent pas notre pays.[...]7 >P. S. 1er Septembre 1919. – En ce qui concerne le Vorarlberg, nous avons reçu, ce matin, une série de nouvelles.
Notre première information fut que la Conférence avait décidé de ne pas inscrire, dans le texte du Traité de Paix, de clause à l’égard du Vorarlberg, et cela d’une part parce que l’opposition de l’Autriche était si forte que l’on craignait qu’elle ne refusât de signer, d’autre part parce que la Suisse n’avait pas pris de position officielle et enfin par ce que le Vorarlberg pourrait toujours s’adresser à la Ligue des Nations.
Nous avons télégraphié à M. Dunant d’insister auprès de M. Dutasta pour qu’au moins le droit du Vorarlberg d’en appeler à la Ligue des Nations fût consigné dans le texte du Traité de Paix.
Nous avons ensuite lu dans le «Corriere délia Sera», que la commission territoriale avait bel et bien proposé l’introduction dans le Traité d’une clause, par laquelle l’Autriche s’engageait à consentir à l’union du Vorarlberg avec la Suisse, si celle-ci en faisait la requête formelle, et après que la Ligue des Nations aurait exprimé un avis favorable. Ce journal ajoutait que le Conseil Suprême n’avait pas accepté cette transaction.
Enfin, nous avons appris que c’était M. Tittoni qui aurait empêché cette combinaison, en déclarant que l’équilibre intérieur des nationalités serait dérangé en Suisse et qu’une Suisse prussianisée pourrait devenir un danger pour l’Italie. Nous avons chargé nos Légations à Paris et à Rom e8 d’expliquer la situation à M. Tittoni et de lui faire comprendre qu’il était de l’intérêt de l’Italie et de la Suisse comme de la France d’insérer dans le Traité de Paix une clause réservant l’avenir du Vorarlberg. Nous ignorons le sort qui sera réservé à nos démarches. Si la situation reste telle qu’elle nous est décrite, aujourd’hui, il ne restera d’autre alternative au Vorarlberg que de s’adresser à la Ligue des Nations, ainsi que M. Tardieu l’exposa à la Conférence, qui acquiesça. La situation est donc fort peu encourageante pour cette population.
- 1
- (Copie): E 2001 (D) c 1/1910-1919.↩
- 2
- A ce sujet, cf. nos 26, 29, 43, 68, 81, 307 et FF 1919, vol.V, pp. 1019-1042.↩
- 3
- Cf. no 38, annexe.↩
- 4
- Pour cette question cf. aussi no 56.↩
- 5
- Cf. no 52.↩
- 6
- A ce sujet, cf. aussi nos 45, 54, 58 et E 2001 (B) 3/9.↩
- 7
- Suivent des informations sur l’Allemagne, sur l’Angleterre et sur l’Espagne.↩
- 8
- Cf. no 60.↩
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