Classement thématique série 1848–1945:
V. CODIFICATION DU DROIT INTERNATIONAL
3. Conférence sur la publication des traités
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 4, doc. 106
volume linkBern 1994
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
Archival classification | CH-BAR#E22#1000/134#840* | |
Dossier title | Internationales Büro für die Veröffentlichung der Staatsverträge (1891–1897) | |
File reference archive | 3.1.3.2 |
dodis.ch/42516 Le Chargé d’affaires de Suisse à Londres, Ch. D. Bourcart, au Chef du Département des Affaires étrangères, N. Droz1
En réponse à votre office du 3 de ce mois relatif à la création d’une Union internationale pour la publication des traites2,j’ai l’honneur de vous informer que j’ai eu l’occasion de voir hier Lord Rosebery et de l’entretenir de cette question. Il m’a avoué qu’il aurait besoin de revoir le dossier de l’affaire qu’il avait quelque peu perdu de vue ayant été absent depuis un certain temps, cependant il m’a dit qu’on ne paraissait pas être très favorable à une semblable institution dans ce pays, attendu qu’on n’en voyait pas trop l’utilité, tous les traités conclus à l’étranger étant déjà communiqués au Foreign Office par ses agents diplomatiques ou consulaires et publiés par les soins de ce Ministère pour autant qu’ils intéressent à un point de vue quelconque la Grande-Bretagne. «Sur les traités qui sont publiés» m’a dit à peu près Lord Rosebery «nous sommes suffisamment renseignés; quant aux traités secrets je ne pense pas que le Bureau en recevrait communication; si vous pouviez me garantir que le premier volume qui paraîtra contiendra le texte de la Triple Alliance et des arrangements franco-russes je signerai des deux mains tout ce que vous voudrez. Mon sentiment est que l’opinion anglaise n’est pas favorable à la création de cette Union et, en outre, on est quelque peu fatigué de toutes les démarches dans le sens indiqué dans votre lettre; mais ce n’est pas la manière de voir belge qui paraît l’influencer mais bien plutôt l’opinion anglaise représentée surtout auprès de lui, pour cette question spéciale, par son Directeur des Archives Sir Edward Hertslet.» Le Ministre m’a très franchement dit qu’il s’en remettrait très probablement aux décisions de ce dernier que l’affaire concerne particulièrement et m’a engagé à le voir tout en promettant d’examiner encore le dossier lui-même.
En Sir Ed. Hertslet j’ai en effet trouvé l’auteur de presque toutes les objections énoncées par Lord Rosebery et un adversaire prononcé de vos propositions. Je crains qu’il ne soit d’autant plus irréconciliable que son amour-propre personnel paraît être en jeu. Il faut se rendre compte que les Hertslet sont une dynastie d’archivistes qui ont rendu de grands services à l’Etat et à la science et qui s’en rendent compte; ils sont une autorité fort écoutée dans les questions de leur compétence. Le père de Sir Edward a été le grand classificateur des archives du Département des Affaires étrangères et son fils, dès sa jeunesse, a participé à son travail pour lui succéder ensuite. Actuellement Sir Edward a de nouveau un de ses fils sous ses ordres et il est probable que ce dernier sera également un jour directeur et représentera la troisième génération des Hertslet à ce poste. Ce sont donc en quelque sorte des dictionnaires et répertoires vivants devenus presqu’indispensables à tous les ministres qui se succèdent et au personnel du Ministère. Que, dans ces circonstances, Sir Edward soit jaloux de sa situation et de son prestige, rien d’étonnant. Or, de la longue conversation que j’ai eue avec lui, j’ai retiré la ferme conviction qu’il redoute la création proposée beaucoup plus par crainte pour son prestige personnel que de crainte de prêter la main à la fondation d’une œuvre dont l’utilité ne lui serait pas absolument prouvée. En effet il faut que je vous explique que, continuant l’œuvre de son père, Sir Ed. Hertslet publie pour compte du Ministère le recueil des traités et conventions anglais ou étrangers qui sont envoyés au Foreign Office par ses représentants à l’étranger. «Cette collection nous suffit amplement» dit Sir Edward «elle contient tous les traités conclus entre Etats étrangers qui à un titre quelconque peuvent avoir un intérêt pour nous fût-ce à titre de modèle. De plus, ces states papers devant être déposés sur le bureau du Parlement sont, selon la règle de cette haute assemblée, traduits en anglais, avantage immense que votre Bureau n’offrirait pas pour nous avec ses traductions françaises. Enfin notre publication est munie d’un registre et répertoire fait avec un soin (N. B. c’est l’auteur qui parle) que n’atteindront guère les fonctionnaires du bureau.»
Vous m’excuserez, Monsieur le Conseiller fédéral, si je me suis étendu un peu longuement sur la personnalité de Sir Ed. Hertslet, mais cet exposé m’a paru indispensable pour bien faire ressortir la nature des difficultés que nous rencontrons et parce que je le répète, à peu près tout dépend du bon vouloir de ce fonctionnaire.
Pour arriver à obtenir de Lord Rosebery qu’il ne se rallie pas à l’opinion de son Directeur des archives (qu’il serait presque impossible de faire changer d’avis) le seul moyen serait je crois de faire parler l’intérêt anglais d’un autre côté; j’entends qu’il faudrait obtenir le concours des hommes influents de ce pays qui peuvent s’intéresser à la création de l’Union. Je tâcherai de trouver des personnes avec qui me mettre en rapport mais je vous serais aussi obligé, si vous êtes d’accord, de me faire connaître si l’Angleterre a des représentants dans l’Institut de droit international sur le concours desquels je pourrais peut-être compter et de m’envoyer leurs noms et adresses.
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Questions of international law