dodis.ch/47343 Le Chef du Département politique, M. Pilet-Golaz, au Ministre de Suisse à Helsinki, K. Egger1

Personnelle

Ce matin, j’ai eu l’occasion de causer avec M. Voionmaa des impressions que vous m’aviez communiquées concernant les sentiments de MM. Etter, Wetter et de Steiger2.

Il m’a paru fort étonné de la chose. Il avait toujours trouvé auprès des conseillers fédéraux une compréhension très sympathique de la situation de la Finlande, tout particulièrement auprès de M. de Steiger, pour ne pas parler, bien entendu, du Chef du Département politique.

Il s’est demandé si les informations qui avaient pu parvenir à Helsinki étaient bien sérieuses. C’était peut-être de la propagande. De quel côté venaient-elles? Pour s’en rendre compte, il fallait qu’il sache qui avait laissé entendre ce son de cloche. Etait-ce un ministre? Lequel? Il y en a quatorze en Finlande.

J’ai dû ne pas lui laisser ignorer que cela me paraissait être le Ministre des Affaires étrangères lui-même.

Bien entendu, M. Voionmaa n’a pas un instant manifesté, par ses paroles ou par son attitude, qu’il pourrait être l’auteur de renseignements de cet ordre.

Au contraire, il m’a affirmé qu’il avait été très heureusement impressionné par les manifestations de sympathie profonde pour son pays qu’il avait constatées chez nous. Sans doute n’était-ce plus l’enthousiasme de 39/40. (Je lui ai fait remarquer que ceux qui sont le plus enthousiastes dans l’amitié sont aussi souvent le plus froids dans l’adversité.) Mais la presse suisse, notamment lors de la déclaration anglaise et récemment encore à propos des conversations Eden-Staline, n’avait pas caché sa compréhension pour la situation finlandaise et les craintes que l’on devait avoir en face du danger bolcheviste.

Ceci pour votre orientation.

Je ne m’explique pas ce qui s’est passé. Les trois noms qui ont été cités sont précisément les trois auxquels je me serais le moins attendu. Y a-t-il intrigue quelque part? Doit-on se méfier de quelqu’un? De qui?

Je dois vous dire que M. Voionmaa me laisse toujours l’impression d’un homme loyal. A-t-on voulu, par une manœuvre, provoquer certaines déclarations ou certaines réactions? Tâchez d’y voir plus clair pour que moi-même je puisse mieux juger de notre attitude et, cas échéant, de nos précautions3.

1
Lettre: E 2300 Helsinki/4.
2
Cf. No 150.
3
Dans sa réponse à Pilet-Golaz, en date du 17 février 1942, Egger ne peut fournir d’explication définitive; il précise toutefois: Es ist für mich ganz zweifellos, dass die Auffassung von Herrn Witting auf der Berichterstattung von Herrn Voionmaa beruht, was dieser Ihnen gegenüber begreiflich nicht zugestehen konnte. Herr Witting erklärte ganz ausdrücklich die Lektüre von Berichten des Herrn Voionmaa und fügte nur hinzu, dass diese freilich verschiedene Wochen zurücklägen. Erstaunlich war es für mich, dass er in diesem Zusammenhang die Namen der Herren Bundesräte Wetter, Etter und von Steiger (frei aus dem Gedächtnis) erwähnte. Diese Namen müssen ihm doch aus einem Grunde haften geblieben sein, denn es ist keinem Aussenminister zuzumuten, dass er die Namen der Regierungsmitglieder sämtlicher Staaten auswendig wisse. In welchem Zusammenhang diese Namen aber in den Berichten aus Bern erwähnt wurden, vermag ich zur Stunde nicht festzustellen. Es kann sich aber nur um Berichte von Herrn Voionmaa handeln. Es ist wohl möglich, dass ich bei einer späteren Unterredung mit Herrn Witting Gelegenheit haben werde, auf dieses Thema zurück zu kommen, und ich möchte Sie bitten, sich bis dahin zu gedulden. Keinesfalls glaube ich freilich, dass sich Herr Voionmaa jemals bewusst zum Werkzeug eines düstern Manövers hergeben würde. Er ist von loyaler Gesinnung und ein Freund der Schweiz.