dodis.ch/46170 Le Ministre de Suisse à Rome, P. Ruegger, au Chef du Département politique, G. Motta1

Les derniers voyages que j’ai entrepris, avec votre assentiment, à Venise et à Naples, m’ont confirmé encore davantage dans mon impression que le mouvement des «fascistes suisses» en Italie, qui nous a valu jadis tant de préoccupations, ne cesse de perdre du terrain. En ce qui concerne l’arrondissement de Venise, M. le Consul Imhof est parfaitement tranquille; d’autre part, notre excellent et très actif Consul à Naples, M. Brenni, a su réaliser, par ses initiatives, ses conférences et ses efforts pour vivifier la vie sociale de la colonie, une telle union entre les Suisses de son arrondissement qu’aucune place ne peut subsister pour des groupements à tendance politique (seul le petit groupe des Suisses de Bari, qui sont au nombre d’une trentaine, doit réaliser une plus grande cohésion, de sorte que, le moment venu, je vous proposerai d’autoriser M. Brenni à se rendre dans cette ville). Les consuls de Turin et de Florence, que j’ai vus à Rome, me donnent également des nouvelles tout à fait tranquillisantes. Seule la colonie suisse de Milan a encore à souffrir de la scission créée par le mouvement fasciste suisse. Depuis ma visite à Milan à la fin du mois d’avril dernier2, le télégramme3 que m’a adressé M. Bühler et l’envoi de ma réponse4, dont vous connaissez le texte, aucun pas en avant sérieux vers l’union désirable n’a pu être fait. J’ai appris indirectement que M. Bühler avait confirmé vis-à-vis de plusieurs compatriotes son intention de «rester en bons rapports avec la Légation». J’attends cependant de lui, comme premier pas, une visite à notre Consul général, M. de Bavier, qui saura l’encourager à faire un geste d’apaisement, et qui veillera aussi à ce que les dirigeants du Cercle Suisse ne se montrent pas trop intransigeants au moment où le chef de la grande maison suisse démontrera des velléités de réconciliation en abandonnant, ou tout au moins en donnant une autre direction à son activité politique. J’envisage même de faire dire à M. Bühler, par des personnes qui sont restées en liaison avec lui, que j’attends absolument de lui une visite à notre Consul général.

En ce qui concerne l’arrondissement de Rome, les contrastes, comme vous le savez, n’ont jamais été aigus. Le petit groupe des fascistes suisses de Rome n’a pas cessé ses relations avec le Cercle Suisse, dans le comité duquel il compte un représentant. Dans votre lettre du 22 avril5 dernier, vous aviez exprimé l’espoir que les membres du groupe romain du fascio suisse seraient présents à la Légation lors de la réception de la colonie, organisée à l’occasion de la réunion annuelle de la Société suisse de bienfaisance. Cet espoir, qui était aussi le mien, s’est pleinement réalisé. J’avais invité les 600 membres de la colonie présents à Rome, et pour ainsi dire tous les membres du fascio suisse sont venus sans porter leurs «distintivi». Indirectement j’ai appris qu’une circulaire du fascio suisse de Rome avait enjoint aux participants à ce groupe de venir à la Légation. Aucune note discordante s’est élevée. Tout cela me confirme dans la conviction qu’en répétant que nous ne connaissons que des Suisses et en faisant des appels fréquents à l’union, nous pourrons atteindre le plus sûrement le but proposé, qui est la fin de toute scission.

1
Lettre: E 2001 (C) 4/104.
2
Sur cette visite, cf. lettre confidentielle de Ruegger à Motta, du 25 avril. Non reproduite.
3
Daté du 23 avril. Non reproduit.
4
Lettre datée du 24 avril. Non reproduite.
5
Non reproduit.