dodis.ch/46169 Le Chef du Département politique, G. Motta, au Ministre de Suisse à Londres, Ch. Paravicini1

Nous avons l’honneur de recevoir vos rapports des 13 et 15 juin2 concernant le voyage en Suisse du Négus3 et nous vous en remercions vivement.

Nous avons été fort intéressés par le compte rendu de la conversation que vous avez eue avec le Dr Martin et son acolyte. Celle-ci fait assez bien pendant à celle que M. Bonna a eue le même jour avec M. Auberson4 et nous confirme dans l’impression que l’entourage du Négus, quoique parfaitement au courant des intentions du Conseil fédéral, n’aurait pas été fâché de pouvoir se mettre au bénéfice d’un malentendu permettant à l’Empereur d’agir à sa guise. Nous nous plaisons à penser que ce risque est aujourd’hui conjuré autant qu’il peut l’être.

Bien que la presse continue à parler de la prochaine installation du Négus à Vevey, nous voulons croire que l’Empereur a enfin compris qu’il se mettrait dans un mauvais cas en passant outre à la volonté du Conseil fédéral et que nous n’avons donc à nous préoccuper que de sa venue à Genève, ce qui est déjà assez embarrassant pour nous. Nous vous savons grand gré, à cet égard, d’avoir insisté de façon très nette pour que la date et l’heure de son arrivée dans cette ville nous soient indiquées suffisamment à l’avance.

Nous relevons que des dates plus avancées que celles de la réunion effective du Conseil et de l’Assemblée de la Société des Nations ont déjà été articulées. Nous ne ferons pas incident pour vingt-quatre ou quarante-huit heures, mais nous notons ce nouvel indice d’une tendance à ne pas vouloir faire ce que nous demandons et nous ne verrions pas d’inconvénients à ce que vous le fissiez savoir au cours d’un prochain entretien.

P. S. Cette lettre était écrite lorsque vous avez téléphoné à M. Bonna pour le mettre au courant de la nouvelle conversation que vous avez eue avec un représentant de l’Empereur Hailé Sellasié. Nous vous serons très reconnaissants de confirmer par écrit à votre interlocuteur que le Conseil fédéral ne peut rien modifier à la décision qu’il a prise et dont les termes ont été communiqués par M. Dunant à M. Wolde Mariam verbalement et par la note ci-jointe en copie5. Nous vous saurons gré également de confirmer que toutes mesures de police seront prises en vue d’assurer la sécurité de l’Empereur pendant son bref séjour à Genève et que nous comptons que, de son côté, l’Empereur ne se prêtera pas à des manifestations publiques.

Les indications que vous avez bien voulu donner à M. Bonna au sujet du revirement qui se produit en Angleterre à l’égard de la politique de sanction nous ont vivement intéressés et nous vous en remercions.

1
Lettre (Copie): E 2001 (C) 4/92. Paraphe: JF.
2
Non reproduit.
3
Cf. aussi no 244.
4
Sur cet entretien avec J. Auberson, conseiller juridique du gouvernement éthiopien, cf. la notice de P. Bonna, du 15 juin, non reproduite.
5
Datée du 15 juin, non reproduite (E 2200 Paris 9/3).