dodis.ch/45663 Le Chef du Département politique, G. Motta, au Ministre de Suisse à Bucarest, F. von Salis1

Nous vous avions chargé, à la date du 1er juillet 19302, d’une démarche de principe auprès du Gouvernement roumain à l’effet de faire faire un pas, que nous voulions espérer décisif, au problème de l’exécution des accords des 13 juin 1924 et 31 janvier 19253 sur les dettes privées roumaines libellées en francs. Etant donné qu’il n’en est malheureusement pas résulté la moindre amélioration, nous nous trouvons, comme précédemment, dans une impasse. La carence, pour ne pas dire l’obstruction, des Autorités roumaines et de leurs organes subalternes réduit pratiquement à néant les obligations assumées à l’égard des créanciers suisses.

Aussi bien, vous vous souviendrez que M. Boeresco4 avait pris, lors des conversations qui précédèrent le lancement en Suisse de l’emprunt roumain de consolidation, l’engagement de s’employer à hâter le règlement des affaires roumaines en suspens. Il est vrai que, lorsque nous avons tenté d’obtenir de lui des assurances écrites, il s’est dérobé. Nous ne doutons pas, cependant, qu’il reconnaîtra nous avoir fait certaines promesses et ne se refusera, par conséquent, pas au service que nous attendons de lui.

Vous voudrez, en effet, bien trouver ci-joint un projet d’aide-mémoire5 où sont exposés nos motifs de plainte et qui nous paraît pouvoir servir de base à une nouvelle intervention diplomatique de votre part. Dans l’état actuel des choses, nous avons évidemment moins que jamais à compter sur la bonne volonté du Gouvernement roumain. Nous avons tenu, néanmoins, à profiter de la présence à Bucarest de M. Boeresco, en Roumanie pour un séjour prolongé, afin de vous prier de vous concerter avec lui en vue d’une démarche simultanée, qui ne restera pas, nous aimons à le croire, sans effets pratiques.

Dans le même ordre d’idées, le Président de l’Office suisse pour les créances en Roumanie, M. le Dr Hodler, est venu nous entretenir de la grande perplexité où le met le fait que la somme de 25 000 francs due par la Roumanie à titre de contribution pour 1929 aux frais de l’Office ne lui a pas encore été versée. Cela ne saurait nous étonner outre mesure si nous en croyons les informations selon lesquelles l’Office roumain, de son côté, ne toucherait plus de subvention de son Gouvernement et que nous songeons aux obstacles de tout genre que rencontre l’exécution des accords de 1924/1925.

La situation précaire de l’Office suisse menaçant, M. Hodler nous l’a confirmé, l’existence même de cette utile institution, nous devons trouver à tout prix les moyens de sortir de l’intolérable état de choses actuel. Nous nous plaisons à espérer, notamment, qu’il vous sera possible d’obtenir le versement d’urgence de l’annuité de 1929 et qu’une entente ne se fera pas attendre au sujet du montant des contributions ultérieures. Pour le surplus, qu’il s’agisse des questions que soulèvent l’exécution forcée et l’arbitrage, l’aide-mémoire nous paraît assez explicite pour qu’il soit superflu que nous l’analysions.

Il nous serait fort agréable que vous voulussiez bien entreprendre, au plus tôt, cette action d’entente avec M. Boeresco, auquel est destiné, dans notre idée, un des exemplaires de l’aide-mémoire. Nous serions favorables, ainsi qu’il ressort de Paide-mémoire, à l’examen de l’ensemble du problème avec une délégation roumaine qui viendrait en Suisse. Si le Gouvernement roumain entrait dans ces vues, nous attacherions un très grand prix à ce que la conférence eût lieu encore cette année.

1
Lettre (Copie): E 2001 (D) 2/265. Paraphe: YX.
2
Non reproduit. Cf. E 2001 (C) 2/59.
3
Accords réglant l'amortissement des dettes privées roumaines. Le Département politique, tout en ayant participé aux négociations, ne les avait pas signés parce qu’il ne s’agissait pas de pourparlers officiels et parce que la Confédération n’y était pas intéressée directement en tant que créancière. Cf. RG, 1924, pp.67-68 et 1925, p.58.
4
Ministre de Roumanie en Suisse. Cf. no 67.
5
Non reproduit.