dodis.ch/43911 Le Ministre de Suisse à Paris, A. Dunant, au Président de la Confédération, G. Ador1

Hier matin, je vous ai télégraphié2 mon entretien avec M. Dutasta qui assure de la façon la plus positive que les neutres seront convoqués assez tôt à la Conférence de la Paix pour exposer leurs vues sur la Société des Nations et discuter les propositions y relatives; M. Dutasta a, dans la conversation, même employé l’expression de «votre plénipotentiaire», ce qui, dans sa pensée, implique bien qu’il ne s’agirait pas de quelqu’un attendant patiemment dans une antichambre ou mettant simplement un mémoire dans une boîte aux lettres.

Or, ce que M. Dutasta me dit avec une très grande sincérité, ne concorde nullement avec ce que M. Lansing a déclaré l’autre jour au Ministre de Norvège, à savoir: «que les neutres ne seraient invités qu’à prendre acte d’une décision des participants à la conférence de la paix»; c’est toujours la même théorie américaine et M. Rappard l’avait, il y a trois mois, entendue de M. Wilson lui-même.

Et maintenant qui croire? M. Dutasta, Secrétaire général de la Conférence ou les Américains? En tout état de cause, je crois que nous ne devrions pas tarder à remettre au Gouvernement français le travail établi par la Commission de Territet;3 vous savez que M. Rappard a remis officieusement avant-hier ce travail à deux Yankees de l’entourage du colonel House; je crois qu’aujourd’hui nous devrions faire un pas officiel et je vous demande d’examiner s’il n’y aurait pas lieu de me charger d’une démarche auprès de M. Pichon pour lui remettre le travail de Territet après qu’il aura reçu l’approbation du Conseil fédéral.

1
Lettre (Copie): E 2200 Paris 1/1514.
2
Paris 1/1514.
3
Cf nos 177, 178.