dodis.ch/43622 Le Ministre de Suisse à Tokyo, F. von Salis, au Chef du Département politique, G. Ador1

J’ai l’honneur de confirmer mes rapports des 30 juillet2 et 31 août3 derniers au sujet d’un traité à faire avec la Chine.

Le Gouvernement chinois n’a pas partagé notre manière de voir. Il estime que le traité à conclure n’est qu’une mesure préliminaire qui devra être suivi, plus tard, d’un traité d’établissement et de commerce. Il tient donc à maintenir le texte exact du traité avec le Chili.

Il est d’accord, d’autre part, de joindre à ce traité une déclaration ou un protocole additionnel de la teneur que vous trouverez-ci-jointe.

Nous sommes tombés d’accord sur ce texte, après une discussion prolongée. Le Gouvernement chinois avait proposé la teneur suivante: «With regard to extraterritorial rights, the Swiss Consuls shall enjoy the same rights as may be conceded to the consular agents of the most favoured Powers. When China will have improved her judicial system, Switzerland will first be ready to give up consular jurisdiction in China

J’ai insisté pour que la juridiction consulaire soit spécialement mentionnée et demandé que l’on remplace le mot «first» par «with the other treaty Powers», estimant qu’il ne nous appartenait pas de prendre l’initiative pour l’abolition de la juridiction consulaire. Le texte convenu est donc comme suit: «With regard to consular jurisdiction, i.e. extraterritorial rights, the Swiss Consuls shall enjoy the same rights as are or may be conceded to the consular agents of the most favoured Powers. When China will have improved her judicial system, Switzerland will be ready, with the other treaty Powers, to give up the right of consular jurisdiction in China

J’ai jugé prudent, en outre, de faire ajouter comme dernier passage à ce protocole additionnel: «It ist understood that a treaty of establishment and commerce will be negotiated in due time. Until such a treaty will have been concluded, the citizens of the High Contracting Parties will in all respects enjoy the same privileges and immunities as are now or may hereafter be granted to the subjects of the most favoured Nation.»

Il garantit à nos ressortissants le traitement de la nation la plus favorisée en toutes choses, assurance qui n’est nulle part expressément mentionnée.

L’arrangement à faire avec la Chine comporterait donc le traité proprement dit et une déclaration ou un protocole additionnel: le traité serait, mutatis mutandis et avec la langue française à la place de la langue espagnole, semblable à celui conclu entre la Chine et le Chili.

A toutes fins utiles j’ai l’honneur de joindre copie de la lettre par laquelle mon collègue de Chine me communique le consentement de son Gouvernement.

J’ose espérer que le Conseil fédéral n’hésitera plus à conclure ce traité devenu nécessaire et que le texte proposé trouvera son approbation. Le Gouvernement chinois désire beaucoup arriver à une solution le plus tôt possible; il a fait toutes les avances et il serait maladroit, je crois, de ne pas répondre à cet appel, car il est impossible de prévoir ce qui arrivera à la conclusion de la paix et quelles concessions seront, le cas échéant, encore faites à la Chine. Cela se pourrait que dans six mois d’ici elle ne fût plus disposée à accorder la juridiction consulaire dans de nouveaux traités à faire. Nous nous trouverions alors dans la même situation que vis-à-vis de la Turquie et risquerions, jusqu’à l’abolition des capitulations, soit pour dix ou quinze ans, de demeurer sans traité et entièrement dépendants de la protection des Grandes Puissances rivales. Ce que cela veut dire, nos compatriotes l’ont appris à leurs dépens et en pâtissent journellement. Aujourd’hui même, j’ai été appelé à intervenir pour une maison suisse à laquelle le consulat de France à Shanghai menaçait de retirer sa protection.

1
Lettre (Copie): E 2200 Tokyo 2/2.
2
Cf no 333.
3
Non reproduit.