dodis.ch/43119 Der schweizerische Gesandte in Buenos Aires, J. Choffat, an den Bundespräsidenten und Vorsteher des Politischen Departementes, A. Deucher1

handschriftlich

J’ai l’honneur d’accuser réception de votre dépêche du 7 juillet par laquelle vous voulez bien m’informer que le Conseil fédéral ne voit aucune utilité à conclure un traité d’arbitrage avec la République Argentine tant que le Parlement argentin n’aura pas ratifié préalablement nos conventions d’établissement et d’extradition.

Je me suis empressé d’en aviser Monsieur le Ministre V. de la Plaza qui a eu un instant de dépit mais a dû convenir que la paresse du Congrès Argentin dépasse les bornes: les Commissions des «Affaires Constitutionnelles» de la Chambre et du Sénat ont à l’étude un monceau de conventions internationales, et malgré les insinuations et réclamations (l’Italie a parlé très fort au sujet d’une Convention d’arbitrage) des représentants diplomatiques des pays intéressés, elles laissent ces affaires dormir du plus profond sommeil pour ne s’occuper que de cuisine politique ou de pensions.

Comme je vous l’écrivais le 28 Mai, c’est précisément au moment où je plaidais auprès de lui la cause de notre convention d’extradition que M. de la Plaza m’a proposé une convention d’arbitrage. J’avais sur la langue de lui répondre qu’en Suisse on n’aime pas le travail inutile et qu’il était superflu de signer de nouvelles conventions si elles devaient rester lettres mortes. Je ne suis pas fâché que vous m’ayez autorisé à lui faire une déclaration dans ce sens, et j’ai l’impression que le coup a porté, M. de la Plaza m’a promis de secouer l’inertie de la Commission de la Chambre et j’espère qu’il s’y emploiera, maintenant que le conflit avec la Bolivie, sorti de la période critique, lui laisse un peu de répit. J’ai insisté sur la convenance de faire passer la dite convention d’extradition pendant la session actuelle des Chambres, car l’année prochaine, avec les fêtes du Centenaire et l’élection présidentielle, il est bien évident que les Chambres laisseront de côté les tractanda de ce genre.

Quant à notre convention de commerce et d’établissement, j’ai bien peu d’espoir et me promets de vous renvoyer à ma dépêche du 15 janvier 19042. A Montevideo, j’ai soumis, pour étude, au Ministère le projet d’une convention d’extradition (v. ma dépêche du 14 avril 19083 au Département de Justice et Police), mais n’en ai reçu aucune nouvelle jusqu’à ce jour.

Quant au Paraguay, si la même convention d’extradition a été ratifiée, c’est un peu grâce à mes relations personnelles avec les membres du Gouvernement d’alors, et surtout grâce à M. Berthet. Celui-ci, qui comptait de nombreux débiteurs parmi les députés sénateurs, et tenait en mains spécialement le secrétaire de la Chambre, leur a demandé de nous faire le plaisir de ratifier cette convention: on ne pouvait lui refuser. Mes collègues ont été stupéfaits de ce résultat presque invraisemblable, et le Ministre d’Allemagne m’a demandé comment je m’y étais pris. Mais je ne voudrais pas vous laisser d’illusion sur l’efficacité de cette convention: le Paraguay n’extradera jamais un individu qui serait porteur de quelque argent ou représenterait quelque utilité comme travailleur.

En signant des conventions avec les nations européennes, la plupart des Républiques sud-américaines ne cherchent qu’à flatter leur propre vanité, à se procurer l’illusion qu’elles sont au rang des nations civilisées. Et elles sont bien décidées à les laisser lettre morte s’il devait en résulter quelque chose d’onéreux pour elles.

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Schreiben: E 13 (B) / 9.
2
E 2200 Buenos Aires 2/14.
3
E 13 (B)/54.