dodis.ch/42510 Le Chef du Département de Justice et Police, L. Ruchonnet, au Chef du Département des Affaires étrangères, N. Droz1

Nous avons l’honneur de répondre à votre office du 11 juillet dernier2 concernant l’arbitrage du Président de la Confédération suisse dans le litige Fabiani contre le Venezuela.3

Après avoir sollicité de l’ambassade française quelques explications complémentaires sur la nature du litige, explications que l’ambassade a fournies par sa lettre du 6 courant4, nous estimons que le Président de la Confédération suisse doit accepter la mission qui lui est confiée.

Bien que de telles missions, sans profit immédiat pour le pays, ne soient pas exemptes d’inconvénients, il est, croyons-nous, du devoir des Etats civilisés de se prêter à ce genre de services internationaux. Moins qu’un autre pays la Suisse pourrait refuser le rôle honorable et pacifique que lui offre l’arrangement franco-vénézuélien.

A vrai dire, nous eussions préféré que la mission fût confiée au Conseil fédéral plutôt qu’au Président de la Confédération, puisque ce dernier n’est pas une autorité distincte, capable de prendre une décision en dehors du Conseil fédéral. Et nous nous sommes demandé s’il ne conviendrait pas d’en faire la remarque aux parties en litige, en les invitant à modifier sur ce point leur compromis. Mais après avoir considéré qu’une observation de ce genre entraînerait un retard de nombreux mois pour la solution du litige, nous nous sommes décidés à ne pas insister sur ce point.

Dans notre opinion, le Conseil fédéral déciderait que le Président accepte l’arbitrage qui lui est offert. Un juriste serait délégué pour instruire la cause au nom du Président, lui faire rapport et lui présenter un projet de sentence, sur lequel le Conseil aurait à délibérer.

En vous soumettant cette manière de voir, nous vous laissons le soin de présenter au Conseil les propositions que vous jugerez convenables.5

1
Lettre: E 2/109.
2
Non reproduit.
3
La sentence fut prononcée le 30 décembre 1896 en faveur de la France. Cf. RG, 1896, p. 81. Pour les mémoires des parties, cf. E. 2001 (A)/591 –592.
4
Non reproduite.
5
L’acceptation de cet arbitrage va pousser le Conseil fédéral à réunir des informations sur le Vénézuéla, sur l’état et l’avenir des relations entre les deux pays et sur la situation de la colonie suisse, cf. Mission Ch. d’Espine (E 2001 (A) 591.