dodis.ch/42159 Der schweizerische Gesandte in Paris, J. K. Kern, an den Bundespräsidenten und Vorsteher des Politischen Departements, E. Welti1

Confidentiel

En me référant aux précédentes communications de la Légation de Suisse, et particulièrement aux rapports2 de M. Lardy des 1er et 9 octobre derniers, j’ai l’honneur de vous transmettre les renseignements suivants au sujet de l’affaire du Simplon:

M. Cérésole, qui est de nouveau à Paris depuis quelques jours, s’est rendu à la Légation de Suisse pour me renseigner sur l’état actuel de ses démarches. Voici, en substance ce qu’il m’a dit dans un entretien que nous eûmes samedi dernier:

Il ne paraît avoir été donné aucune suite au projet d’un examen en commun de la question par les Ministres des Travaux Publics, de la Guerre, du Commerce et des Finances, dont il avait été parlé précédemment (lettre de M. de Freycinet du 18 mai dernier3).M. le Général Farre, d’après ce que M. Cérésole tient de la bouche même de ce Ministre, n’aurait jamais été invité à élaborer le préavis de son département.

M. Cérésole a conféré, dans les derniers temps, au sujet de toute l’affaire, avec MM. Gambetta, Magnin, Ministre des Finances, et Léon Renault, Député à la Chambre, qui tous les trois, se sont trouvés cet automne à Lausanne ou dans les environs. A la suite de ces entretiens, il a été arrêté le plan suivant: M. Léon Renault, usant de son initiative parlementaire proposerait à la Chambre d’adopter un projet de loi par lequel elle se déclarerait favorable au percement du Simplon, et voterait, pour assurer l’exécution de l’entreprise, un crédit de 48 à 50 millions (le chiffre n’est pas encore fixé). Un nombre important de députés, de 100 à 150, adhéreraient par leurs signatures à la motion de M. L. Renault, qui serait formulée, si ce n’est dans la première, du moins dans la deuxième semaine de la session législative ouverte demain (9 novembre). La discussion serait mise à l’ordre du jour à une date aussi rapprochée que possible, et peut-être déjà dans le délai indiqué ci-dessus. Le Gouvernement serait chargé d’ouvrir des négociations avec la Suisse et l’Italie au sujet de la participation financière de ces deux Etats. M. Cérésole a communiqué à M. L. Renault toutes les données et tous les documents nécessaires pour mettre ce dernier à même de soutenir sa proposition contre les objections qui pourraient se produire. M. Renault aurait étudié la question à fond.

M. Cérésole a ajouté que M. Gambetta lui avait déclaré être parfaitement décidé à appuyer de son influence, et par l’intermédiaire de ses amis, le projet en question. M. Renault et consorts se mettront en relation avec le Gouvernement, et ils pensent obtenir qu’il ne fasse pas d’opposition. Ils seraient déjà assurés du concours, soit de M. Sadi Carnot, Ministre actuel des Travaux Publics, soit de M.Magnin, Ministre des Finances. Ce dernier a dit à M.Cérésole: «L’argent nécessaire se trouvera».

D’après ce qui précède, l’affaire du Simplon est sur le point d’entrer dans une nouvelle phase, et l’on peut, semble-t-il, prévoir qu’elle aura, devant les Assemblées françaises, une solution assez rapprochée, si, comme les intéressés l’espèrent, l’on peut vaincre l’opposition, ou tout au moins l’inactivité du Gouvernement.

Vous vous souvenez, Monsieur le Président, qu’il avait déjà été question, depuis assez longtemps, de mettre en jeu l’initiative parlementaire d’un député favorable à l’entreprise, soit par voie de motion, soit par celle d’une interpellation (Voir les deux rapports précités de M. Lardy). Mais, MM. Cérésole et Gambetta avaient préféré attendre encore, pour ne pas froisser les membres du Gouvernement. La composition actuelle de ce dernier les a décidés à sortir de l’expectative.

J’ai demandé à M. Cérésole s’il redoutait l’opposition probable des amis du projet d’un percement du Mont Blanc. Il m’a répondu que non. D’après son avis et celui de M. L. Renault et consorts, cette opposition serait dans tous les cas impuissante à empêcher la réunion d’une majorité favorable au Simplon.

Il est manifeste que si, aujourd’hui, l’on se décide à porter la question devant les Chambres, cela doit être attribué à la retraite de M. de Freycinet. Celui-ci, en effet, d’après tous les indices, exerçait sa haute influence dans un sens hostile au projet, sans toutefois se prononcer catégoriquement et ouvertement contre.

Je me ferai un devoir de vous tenir au courant de ce qui pourra survenir d’important au sujet de l’affaire, dans la nouvelle voie où elle est sur le point d’entrer,[...]4

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Bericht: E 53/83.
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Nicht abgedruckt.
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Nicht abgedruckt.
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Es folgt die Grussformel.