Par dépêche du 1er janvier dernier le Consul suisse à Gênes nous mande que depuis quelque temps il semblerait qu’on enrôle en Suisse des troupes pour le service du pape;2 que du moins on a lieu d’être frappé de voir dans les derniers temps des jeunes gens vigoureux venant par petits détachements surtout des cantons de Lucerne, Soleure, Schwyz, Zoug, Unterwalden, s’embarquer à Gênes pour Rome, soi-disant dans le but d’y exercer un métier; toutefois plusieurs d’entre eux ayant des professions dans lesquelles ils ne trouveront point d’occupation à Rome, le soupçon qu’ils sont destinés au service militaire se justifie d’autant plus que les passeports de tous les individus en question qui ont eu à faire avec le consulat suisse étaient visés gratis par la nonciature du pape à Lucerne et qu’en outre, et contre l’habitude des gens de métier, ils étaient tous abondamment pourvus d’argent de voyage.
En date du 26 du mois écoulé3, le Consul annonce que l’embauchage pour Rome a beaucoup diminué ces derniers temps, mais qu’en revanche il se fait tant à Gênes qu’à la frontière et à ce qu’il paraît dans le canton du Tessin même des enrôlements considérables pour la Légion italienne à Montevideo, et que de nombreux citoyens tessinois s’y laissent entraîner courant ainsi à une perte certaine. La plupart ayant leurs titres de voyage en règle, le Consul n’a pu jusqu’à présent faire autrement que d’avertir ces malheureux, mais la plupart du temps sans succès.
Ensuite de ces communications, en présence de la suspension des enrôlements décrétée par l’Assemblée fédérale4, et considérant que la plupart de ces individus sont astreints au service militaire en Suisse, nous avons adressé aux consuls suisses à Gênes, à Livourne et à Marseille5, l’ordre de refuser le visa consulaire pour aller plus loin, lorsqu’il y a évidemment embauchage pour service militaire étranger, n’importe que les individus soient enrôlés pour Rome, Naples ou Montevideo puisque tout enrôlement pour l’étranger est interdit en Suisse.
La communication ci-dessus du Consul à Gênes se trouvant confirmée par diverses nouvelles parvenues en Suisse, nous vous donnons par la présente communication des dites instructions adressées aux consuls à Gênes, Livourne et Marseille, vous priant en même temps d’aviser aux mesures convenables en vue d’empêcher autant que possible les enrôlements pour le service militaire étranger, ainsi que de poursuivre et punir les embaucheurs.