La venue du dalaï-lama dans notre pays donne à nouveau lieu à une discussion3. Le Chef4 du Département de justice et police commente la proposition5 de son département. Le problème de l’information apparaît comme étant particulièrement délicat, car l’on peut craindre des fuites. D’autre part, si les renseignements donnés à la presse sont trop parcimonieux, il faudra s’attendre à des critiques. M. Graber attire l’attention sur la nécessité de peser chaque mot dans la lettre qui sera adressée à l’avocat6 du dalaï-lama, eu égard notamment aux explications qu’il faudra donner aux Chinois7. Le Chef du Département politique estime que les deux départements intéressés devraient se mettre d’accord sur le texte de la lettre. M. Furgler précise que toutes les considérations faites par le Chef du Département politique n’ont pas ou que peu de rapport avec la Police des étrangers. L’intervention du Chef du Département de justice et police était tout à fait personnelle; c’est à lui qu’il appartient de mener la lutte contre la propagande politique.
M. Graber exprime son désaccord. On ne saurait rendre responsable le Département politique chaque fois qu’il y a des implications extérieures à une affaire. En l’espèce, la politique suisse à l’égard des hôtes étrangers ne relève pas de son département. M. Gnägi abonde dans ce sens, tout en relevant que ces problèmes concernent le Conseil fédéral, auquel il appartient de se prononcer sur la base de documents que les départements lui présentent. M. Brugger estime que les limites de compétences sont difficiles à fixer. Il ne faut dès lors pas s’étonner que, lorsque quelque affaire a des implications extérieures, on fasse, dans l’opinion publique et dans la presse, une relation immédiate avec le Département politique. C’est là une réaction normale. Le problème du dalaïlama lui paraît délicat au point qu’il faut ou rédiger différemment le texte de la lettre, ou alors renoncer à un certain nombre de détails. Il est clair, par exemple, que si le dalaï-lama visite la colonie tibétaine de Rikon8, on peut imaginer que le Conseil communal de la commune intéressée prendra part à cette rencontre. M. Furgler précise qu’il a entendu parler de cette affaire pour la première fois lors de la dernière séance. Il n’a pas partagé l’avis du Département politique, estimant que les restrictions apportées à la venue du dalaï-lama étaient excessives9. Dans sa proposition, il a tenu compte des considérations politiques, mais il persiste à dire que la décision ne correspond pas à sa conviction profonde. Il est d’avis qu’un communiqué doit être soumis au Conseil fédéral pour qu’il en prenne connaissance. M. Graber estime que, sur le fond, son collègue n’a pas fait le tour du problème. L’activité politique d’étrangers en Suisse est aussi très importante. Les règles impératives qui relèvent d’une pratique constante du Conseil fédéral sont valables ici aussi10. Il précise que le Département de justice et police est responsable de l’observation de ces règles.
En conclusion11, le Conseil charge les deux départements intéressés de rédiger en commun la lettre à l’avocat du dalaï-lama ainsi qu’un communiqué12 qui sera remis à la presse.
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